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Service national universel : chronique d’un échec annoncé

Chapo

Le Sénat, réputé conservateur, vient de rayer le Service national universel (SNU) du projet de loi de finances, portant un coup fatal, mais pas encore définitif, à ce projet présidentiel sans cesse contesté.

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La promesse d’Emmanuel Macron de mettre toutes les jeunesses en marche au nom de l’intérêt général et des valeurs de la République a toujours peiné à séduire, en premier lieu du côté des armées. Après un rapport détonnant de la Cour des Comptes, au moment où le débat budgétaire semble devoir inéluctablement l’emporter, trouvera-t-on des défenseurs du SNU ?

Un dispositif coûteux et redondant

Les objectifs annoncés du SNU, comme renforcer le civisme, la cohésion sociale et l'engagement des jeunes, sont jugés vagues et difficiles à mesurer. Du service civique au cadets de la défense, en passant par les séjours de vacances ou le Bafa, il existe depuis longtemps d’autres dispositifs, matures, pouvant répondre à ces défis et qui auraient gagné à être renforcés.

Un modèle nostalgique

Beaucoup des défenseurs du SNU sont loin d’avoir l’âge de le vivre. La dimension militaire, pourtant modeste par rapport au projet initial, attise les militants du retour du service militaire, vu tantôt comme une période, mythique, de rattrapage des inégalités qui demeurent à la sortie de l’école, ou comme une tentative de militarisation déguisée de la jeunesse portant atteinte à certaines libertés individuelles. En réalité, on est loin de tout cela dans des colonies de vacances d’État plutôt bien-pensantes… au gré de leur encadrement.

Une organisation introuvable

De préfigurations en expérimentations, l’autre écueil du SNU réside dans son organisation, qui ne permet pas de passer au principe de réalité ses ambitions démesurées. Problèmes d’inclusion, impossible mixité géographique… le retrait progressif des Armées et l’absence d’engagement réel de l’Éducation nationale condamnaient l’avenir.

Du côté des associations de jeunesse et d’éducation populaire, majoritairement réservées, le SNU a pu avoir un goût d’eldorado. Les différentes phases du programme ont pu ainsi, en sortie de covid, contribuer à maintenir à flots certaines structures, qui pourraient être gravement fragilisées, à retardement, par l’abandon des séjours de cohésion.

Nous ne contesterons pas que, pour ceux qui l’ont vécu, le SNU aura permis de vivre une expérience collective forte, souvent joyeuse et régulièrement constructive. Mais finalement, et qui peut le nier, le SNU est demeuré un projet déconnecté des préoccupations réelles des jeunes, et les moyens humains, matériels et financiers qu'il a mobilisé pourraient être alloués à des initiatives plus pertinentes.

Il est temps de soutenir à nouveau les organisations qui ont les savoir-faire pour accueillir les jeunes en privilégiant des initiatives existantes ou innovantes, plus inclusives, moins coûteuses et réellement en phase avec les besoins actuels, des jeunes comme de la société.

Paragraphes

Le Service national universel supprimé du Projet de loi de finances

Le 16 janvier, les sénateurs ont acté en séance publique la suppression du SNU, qui rencontrait la défiance de la gauche comme de la droite. L’adoption de l’amendement d’Éric Jeansannetas (SER) baisse ainsi de 100 M€ les crédits du SNU (sur les 128,3 M€ initialement pour 2025). Les 28,3 M€ restant sont destinés à "amortir l’arrêt du dispositif". Sur ces 100 M€ économisés, 80 M€ sont reversés au budget du sport, par le vote d’un amendement du sénateur LR Michel Savin.

Pour rappel, Éric Jeansannetas (SER) avait rendu un rapport critique sur le SNU. Devant le Sénat, il a rappelé que la généralisation du SNU n’était "ni possible, ni souhaitable" et que la Cour des comptes évalue son coût "entre 3,5 et 5 milliards d’euros par an". "Après 5 ans d’expérimentation, il n’apporte aucune plus-value" et "seuls 35 700 jeunes se sont inscrits pour 2025. C’est très loin de l’objectif des 66 000", a conclu le sénateur.

Titre :
Service national universel : chronique d’un échec annoncé
Auteur :
Marc Guidoni
Publication :
23 janvier 2025
Source :
https://www.jdanimation.fr/node/2672
Droits :
© Martin Média / Le Journal de l'Animation

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